TARRADE Julie
2017
Abstract
La prison est conçue comme la peine de référence pour assurer la répression de la délinquance. Elle constitue donc une rupture du quotidien ; tout ce qui fait partie de celui-ci en est affecté, sa part sociale et aussi socialisée dont les liens familiaux et parentaux en font partis. Les liens parentaux sont pourtant des appuis qui peuvent faciliter la réinsertion du parent détenu dans sa propre famille, mais aussi participer à l’écriture de l’histoire familiale. Néanmoins, cette expérience demeure celle de la séparation qui pousse plus d’un parent à garder le silence, en pensant protéger l’enfant de ce monde à part, pourtant présent dans notre société. Cet appauvrissement du lien familial est un enjeu crucial. Notons qu’aujourd’hui, 30 % des enfants de détenus, vont en prison à leur tour. Ce chiffre signe l’inefficacité d’un parcours, dont il est nécessaire d’endiguer ce phénomène de l’incarcération héréditaire ainsi que faciliter et préparer la réinsertion du détenu de courte durée via un renforcement des liens familiaux au travers des séquences de parloirs. Plus encore, faire perdurer et soutenir les relations familiales pendant cette séparation, permettra à l’enfant de se construire personnellement dans une sphère familiale plus compréhensible. Dans une nécessité certaine de conforter le parent dans son rôle parental afin d’accroître l’estime qu’il a de lui-même, comment le designer graphique pourrait-il permettre au parent détenu confronté à une tout autre manière de vivre, d’avoir une vision positive et plausible d’un avenir familial uni ? Comment avant tout accompagner la famille dans cette épreuve afin de lui permettre d’assumer cet événement en recréant un dialogue familial positif afin que l’enfant accède à cette chance ? Le monde carcéral souffre de problèmes de logistique et de gestion colossaux qui ne facilitent pas la relation entre la prison et la société civile libre. Peut-on, tant que designer graphique s’insérer dans un tel environnement fermé sur le monde extérieur ? Quel serait alors le devenir du messager si l’essence même du problème est un manque de communication ? Faisant face à un environnement d’intervention inabordable, mais où tout reste à faire, le designer graphique se positionne comme un acteur conscient des enjeux sociaux actuels. Un designer qui pense le design comme un projet d’amélioration ou de résolution d’une insatisfaction vis-à-vis du monde, de façon à le rendre plus praticable pour la collectivité.
Méthodologie
En France, il y a 30% d’hérédité carcérale. C’est à dire que 30% des enfants dont l’un des parent fût ou est incarcéré durant l’éducation de l’enfant, est à son tour incarcéré au cours de sa vie. La motivation principale fût l’enjeu social lié aux difficultés du monde carcéral. Ce sont des réalités, parfois volontairement ignorés car nous considérons la population carcérale comme les échecs de notre société. Ce manque d’estime traduit un manque d’accompagnements aux familles de prévenus dont leur rôle parental est bafoué mais aussi, l’éducation de l’enfant est mis à mal. J’ai eu la chance de rencontrer des intervenants en milieu carcéral. Mais surtout de collaborer avec un psychologue et coordinateur familial, intervenant en prison auprès de familles séparés par l’incarcération. Son rôle est d’accompagner physiquement, psychologiquement et méthodologiquement l’enfant et son parent lors des visites régulière afin de ne pas rompre la communication familiale. Cette rencontre est essentielle pour renforcer l’estime parental et soutenir l’enfant dans sa compréhension du monde carcéral. En tant que designer visuel, c’est un sujet qui amène à repenser engagement social et professionnel. En faisant face à un environnement d’intervention inabordable mais où tout reste à faire, le designer doit penser le design comme un projet d’amélioration ou de résolution d’une insatisfaction vis-à-vis du monde. C’est une façon d’améliorer la considération et l’appréhension de notre collectivité vis-à-vis d’une population délaissée. Peut-être que le design peut-être envisagé comme une manière d’amener un sujet sur la table de ceux qui veulent l’ignorer. Il est important d’aborder un sujet de mémoire, qui en soit, nous accompagnera pendant plus d’un an et demi comme un challenge qui élargira nos connaissances sur le monde. Le but étant de ne pas s’enfermer dans un sujet que l’on maitrise presque déjà trop!